J’ai eu le plaisir de répondre à l’interview de la Start Up, Goalmap, qui aide les entreprises à prendre soin de la santé et du bien-être de leurs salariés,
Pour parler de bien-être des salariés, nous invitons régulièrement des professionnels nous parler du secteur, des solutions qu’ils préconisent, des difficultés qu’ils peuvent rencontrer. Aujourd’hui c’est Céline Meyrignac, psychologue du travail, consultante RH, coach et formatrice, qui a gentiment accepté de répondre à nos questions.
Bonjour Céline, pourquoi les entreprises ont un rôle à jouer dans le bien-être de leurs salariés, selon toi ?
Les employés se déclarant “épanouis et heureux” ont une productivité supérieure de 31%.
Les entreprises ont un grand bénéfice à créer des conditions favorables au bien-être des salariés. Les personnes qui ressentent du bien-être au travail sont plus productives, plus rentables ; c’est désormais prouvé par de nombreux travaux de recherche universitaires en psychologie du travail et en management.
Un exemple : une étude de 225 méta analyses académiques montrent que les employés se déclarant “épanouis et heureux” ont une productivité supérieure de 31%, plus de vente à 37% et 3 fois plus de créativité – Harvard Business Review, 2016).
A contrario la pression, les conflits, coûtent cher ! Absentéisme, turnover, dégradation du cadre de travail, etc.
Le “bien-être” est un terme vague, parfois galvaudé. Pour toi, c’est quoi le bien-être des salariés ?
C’est à chaque entreprise de trouver ce qui permet les conditions du bien-être !
En effet le terme est beaucoup utilisé mais comme dans tous les domaines il faut pouvoir s’approprier un concept et l’adapter spécifiquement à son propre contexte.
La question serait plutôt : c’est quoi le bien être pour nous, dans notre entreprise et en ce moment ? Je comprends les personnes qui peuvent s’agacer de l’image “canapé / baby foot” qui est diffusée partout comme la représentation concrète du bien-être en entreprise, or c’est à chaque entreprise de trouver ce qui permet les conditions du bien être !
De manière plus concrète le bien être englobe le corps et l’esprit, c’est donc créer des conditions physiques et matérielles sécurisantes et adaptées qui permettent au corps de travailler, de faire des pauses, dans des conditions matérielles au moins correctes.
Peux-tu nous donner quelques exemples d’actions que tu as menées pour améliorer le niveau de bien-être de l’entreprise ?
J’interviens dans ce domaine en tant que Psychologue du Travail, Consultante RH, Coach et Formatrice : cette approche plurielle me permet de toujours intervenir au niveau du Système.
Un audit permet d’entendre chacun et de travailler au niveau global : les sujets des conditions matérielles et relationnelles du travail peuvent être évoqués librement et les résultats globaux donnent des tendances fortes et des signaux faibles auxquels il va falloir faire attention.
Il existe des outils tels que le “Cultural Transformation Tool” du Barret Values Center qui met en évidence les écarts entre les valeurs souhaitées par les salariés et celles qui sont vécues réellement. C’est souvent très révélateur, et cela donne des pistes pour agir.
Les conditions de base de sécurité, d’hygiène, peuvent être travaillées mais c’est la plupart du temps sur la communication à tous les niveaux de l’entreprise que j’agis : dès que la communication redevient professionnalisée, bienveillante et efficace les personnes se sentent beaucoup mieux.
J’anime des ateliers d’information sur le stress en format court qui permettent une information scientifique et psychologique avec des astuces pratiques pour mieux prévenir ou vivre les périodes de tension. La communication que j’évoquais relève du savoir être et est difficile à modifier, il faut une vraie volonté.
Au delà du Coaching qui est un investissement personnel fort, il est toujours utile de rappeler lors d’ateliers de formation ou d’ateliers les basiques qui permettent de bien améliorer la relation et donc les tensions : l’art du feedback par exemple qui est essentiel et bien mal connu.
Quels sont tes conseils pour les RH qui veulent aider leurs employés à concilier vie professionnelle et vie privée ?
Les DRH ont pour moi un rôle stratégique à ce niveau car ils sont les garants du respect des “droits et devoirs” collectifs au sein de l’entreprise et également souvent une référence de support individualisé pour les collaborateurs. C’est au DRH ou à son équipe que l’on parle le plus de ses “deux vies” et le respect de la confidentialité est le socle de cette confiance.
Les DRH savent par exemple lutter avec leur Comité de Direction avec une positive fermeté contre le présentéisme cultivé par les Français, parfois au détriment de la qualité et de l’efficacité.
Beaucoup de personnes sont bien plus passionnées que l’on dit au travail : elles sont un stress positif qui peut basculer vite en négatif, alors il faut moduler et aider à prendre du recul. Cela peut avoir un impact négatif sur la vie privée et professionnelle car l’investissement du collaborateur n’est plus au juste niveau.
Mes conseils sont de partir avant tout de la culture spécifique de l’entreprise, de son organisation et de synthétiser les besoins liés au business et aux caractéristiques des salariés. Puis d’être pragmatique et pratique en restant ouvert : ce qui est simple est souvent le mieux, et si une solution ne fonctionne pas, on la change ! Pour moi plus le collectif vécu au travail est sain, plus il est plus facile de développer une vraie vie privée.
Parmi les solutions que je préconise : le droit à la déconnexion, les agendas partagés… Oui si cela a du sens et avec des règles validées par tous. Si je veux écrire mes mails le dimanche soir parce que cela me détresse pour le lundi, je peux le faire, mais ils partiront en programmation lundi matin à 9H par exemple. Le télétravail permet de résoudre les soucis des parents mais aussi de travailler au calme quand c’est nécessaire. Et bien sûr un travail de fond de développement RH : entretiens, formations, ateliers bien-être ou culturels, temps de convivialité, et coaching.
Comment sensibiliser les managers à l’importance du bien-être des salariés ?
Le bien-être n’est pas un luxe, il ne coûte pas cher et rapporte beaucoup.
Je travaille avec tout type d’entreprises, de tout secteur, avec une culture française ou internationale, je suis basée à Marseille mais mes clients peuvent avoir des établissements partout en France. De 2000 salariés à moins de 10… Le bien être est une préoccupation bien plus présente aujourd’hui, elle s’exprime de manière différente selon la culture et l’histoire des organisations. Les managers y sont d’autant plus sensibilisés qu’ils vivent au quotidien avec les équipes : ils sont souvent désarmés par des attitudes négatives et des conflits.
Il faut accepter l’idée que le bien être n’est pas un luxe, qu’il ne coûte pas cher et rapporte même beaucoup. Un collaborateur très bien sans sa mission et dans sa boîte donne souvent bien plus qu’attendu !
Quels sont les freins au bien-être au travail ?
Les freins peuvent venir d’un comité de direction ou d’un dirigeant qui ne communique pas : la stratégie est non partagée, les messages ambigus et les Managers peinent à ne pas ressentir une pression qu’ils diffusent à leurs équipes.
Ils sont aussi culturels, cette idée qui vient de la scolarité que le “chef” doit tout savoir mieux que les autres, cette idée de l’autorité ou du leader « naturel »… Rien n’est plus faux, les soft skills sont un vrai travail, ou plutôt un sport : il faut se former toute la vie et s’entraîner régulièrement, accepter les jours avec et sans avec humilité et revoir toujours ses basiques : est ce que je connais bien mon équipe ? Quels sont nos enjeux et ce qui nous anime ensemble ? Comment gagner ? Comment cultiver ce que nous faisons le mieux ? Et penser à récupérer, à célébrer… Comme une équipe sportive !
Plutôt que de ne voir que ce qui ne va pas il faut accepter que travailler c’est résoudre des problèmes. Le jeu est de les résoudre avec bonheur, cela rend performant !
Comment convaincre les entreprises d’aller au-delà de la simple communication sur la marque employeur ?
Une marque employeur basée sur des valeurs qui ne se concrétisent pas par des actions réellement réalisées démotive les collaborateurs.
Il faut réaliser un vrai travail de fond sur les valeurs, la communication et la manière spécifique de travailler dans l’entreprise, en évitant à tout prix de vouloir coller à une image qui ne correspond pas à la réalité, sinon cette communication risque d’être contre productive. Une marque employeur basée sur des valeurs qui ne se concrétisent pas par des actions réellement réalisées et visibles sur le terrain est très négative pour les candidats et démotive les collaborateurs qui devraient porter ces valeurs. Et attention à Glassdoor ou même votre adresse évaluée sur Google et autres informations numériques qui cassent très facilement vos efforts de communication !
Même les entreprises supposées être non attractives ont des atouts réels à valoriser … à condition qu’ils sont réels. Après on peut faire beaucoup !
Le Bien être, la QVT ce n’est pas une stratégie, c’est LA stratégie qui permet de créer la richesse humaine et économique.
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